Réseaux sociaux et santé mentale, y a-t-il un lien? Partie 1 : Quels rôles ont ces plateformes dans nos vies?

Dans un monde de plus en plus connecté, les réseaux sociaux occupent une place prépondérante dans nos vies. Pascal Minotte est psychologue et psychothérapeute du CRéSaM, le centre de référence en santé mentale en Wallonie. Il nous éclaire sur le lien entre l’utilisation des médias sociaux et la santé mentale chez les adolescents. Il souligne l’importance des réseaux sociaux comme espaces de socialisation. 

Nous vous rencontrons aujourd’hui pour parler du lien entre l’utilisation des réseaux sociaux et la santé mentale chez les adolescents. Selon vos analyses, y a-t-il un lien entre la santé mentale des jeunes et l’usage de ces réseaux social justement?

Il y a énormément de travaux qui traitent de la question. Les adolescents sont la population qui a été la plus étudiée. Effectivement, ces études montrent, d’une perspective très générale, un lien plutôt négatif entre la santé mentale des adolescents et l’usage des médias sociaux. Mais ce lien négatif observé est très faible contrairement à ce qu’on peut dire parfois.

Quel est le rôle des réseaux sociaux dans la vie d’un ado ?

Il faut bien comprendre que toutes les possibilités offertes par les médias sociaux sont complètement en phase avec les enjeux de l’adolescence. Ces enjeux peuvent être énumérés rapidement. D’une part c’est le fait de se distancer des parents et se centrer très fortement sur les relations avec ses pairs, c’est-à-dire avec les amis. Les médias sociaux vont permettre ce rapprochement et cet « hyper contact » avec les pairs. Rester en contact avec ses amis dans la vie réelle est une des principales raisons pour lesquelles les adolescents sont particulièrement gourmandes de médias sociaux.

Un autre enjeu de l’adolescence c’est se définir, travailler son identité de façon un peu alternative, différente de ce qui se passe dans la famille et de ce qui se passe vis-à-vis des parents. Les médias sociaux sont un des premiers lieux où les adolescents vont donner à voir une identité émancipée du regard parental.

C’est aussi un lieu où les adolescents vont trouver de l’autonomie. C’est un enjeu fondamental pour eux. C’est un espace de liberté. Ils vont y trouver des territoires qui ne sont pas ou peu surveillés par les adultes. Ce qui peut être une source d’inquiétude pour les adultes. Ça explique le fait qu’adolescence et médias sociaux, ça matche bien ! Ça permet aussi de comprendre toute l’intensité des usages des adolescents, sans faire référence finalement à l’idée d’addiction.

Quel est le rôle de ces plateformes dans leur socialisation ? À quel besoin répondent les médias sociaux ?

Il y a une chose à laquelle on ne pense pas souvent : c’est que finalement les médias sociaux viennent proposer un espace qui n’est plus tellement disponible pour la jeunesse actuelle, à savoir des espaces informels de socialisation qui ne sont pas surveillés. Par le passé, la socialisation aussi bien des enfants que des adolescents se passait à l’extérieur de la maison, du milieu familial. On allait dehors, on traînait dehors avec ses copains. C’est quelque chose qui, à l’heure actuelle et depuis quelques décennies, n’est plus tellement bien vu.

À la fois on a envie de protéger nos adolescents et nos enfants. Et en même temps, on a aussi envie de façon un peu ambivalente, de se protéger d’eux. En effet, on n’est pas très rassuré de voir un groupe d’adolescents traîner dehors et dès qu’ils traînent un peu trop longtemps dehors, on va envoyer un éducateur, voire même la police pour s’inquiéter de ce qui se passe. L’injonction contemporaine tacite est de garder vos adolescents à la maison.

Or, les adolescents vont rechercher des espaces dans lesquels socialiser de façon informelle et ces espaces, à l’heure actuelle, ce sont devenus principalement les médias sociaux. C’est devenu internet. C’est la raison pour laquelle ils traînent beaucoup ensemble, par exemple sur les chats ou les jeux vidéo en ligne, …

On a beau critiquer et se plaindre du temps que nos adolescents passent sur les médias sociaux, mais ces médias sociaux viennent juste proposer une alternative à des espaces qui manquent pour eux à l’heure actuelle ailleurs.

Ces espaces manquants, ne faudrait-il pas travailler là-dessus ? Ne doit-on pas reprendre confiance en l’espace public ?

Dans l’idéal, il faudrait que les adolescents puissent avoir des espaces de socialisation, d’aménager les espaces urbains, notamment les grandes villes, pour que les adolescents puissent se retrouver. Mais, on en est loin. À l’heure actuelle, c’est un peu difficile de l’imaginer. Il y a une pression très forte adressée aux parents pour garder leurs enfants et leurs adolescents à la maison. L’injonction qui serait d’ordonner aux adolescents de traîner moins sur les médias sociaux, si on ne leur offre pas d’alternatives, est un petit peu vaine.

Visionne l’intégralité de l’interview en vidéo:

Retrouve la suite de l’interview :

Pour lire la note complète de Pascal Minotte : Adolescence, médias sociaux & santé mentale.

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